
Réduire les couts de la santé grâce à un meilleur échange des données
Le Centre hospitalier Bienne (CHB) a lancé le projet «patient@home», dont l’objectif est de renforcer la prise en charge à domicile des patient-e-s. La Haute école spécialisée bernoise BFH a endossé la responsabilité de l’étude de faisabilité. Fondamentalement, le projet vise à améliorer l’échange d’informations entre les différentes institutions de santé. À moyen terme, le CHB souhaite intégrer ce modèle dans ses opérations quotidiennes et, du même coup, remédier à la pénurie de personnel qualifié et contribuer à la baisse des couts de la santé.
Le système de santé suisse fait face à de nombreux problèmes: par exemple, l’augmentation du nombre de personnes âgées et de malades chroniques qui doivent être soigné-e-s dans les hôpitaux. En même temps, ces personnes aimeraient pouvoir être soigné-e-s plus longtemps à leur domicile. À cela s’ajoute depuis des années une importante pénurie de personnel qualifié qui s’est encore aggravée dans le sillage de la pandémie de coronavirus. De ce fait, les hôpitaux disposent de moins en moins de personnel pour les soins. Quant aux couts du système de santé suisse, et dans leur sillage, les primes d’assurance maladie, ils ne cessent d’augmenter.
Une solution envisagée consiste à renforcer la collaboration, en particulier l’échange d’informations entre hôpitaux, services des soins et médecins généralistes, ce qui permettrait de réduire la durée des séjours hospitaliers et d’améliorer les soins à domicile. Les patient-e-s pourraient ainsi quitter l’hôpital plus tôt une fois les premiers soins administrés. Pour leur part, les personnes souffrant de maladies chroniques pourraient bénéficier plus longtemps d’un suivi et de soins à domicile. Aujourd’hui, lorsque les patient-e-s quittent l’hôpital, les informations disponibles pour la suite de leur traitement sont souvent insuffisantes.
Des réseaux de santé diversifiés
À l’automne 2022, le Conseil fédéral a proposé un deuxième paquet de mesures pour réduire les couts de la santé. Celui-ci prévoit la création de réseaux entre les différentes institutions de santé en vue d’améliorer l’échange d’informations et de soins coordonnés. Une telle coordination constitue toutefois un véritable défi, tant sur le plan des processus que des technologies informatiques, les systèmes de traitement des données en Suisse étant aussi diversifiés que le système de santé en général. Une quinzaine de systèmes informatiques hospitaliers différents sont actuellement utilisés dans les hôpitaux suisses. Une situation semblable se dessine chez les organisations d’aide et de soins à domicile. Dans le milieu des médecins généralistes, pas moins de 80 systèmes différents sont utilisés. Il en va généralement autrement dans les systèmes dotés d’un système de santé public. C’est notamment le cas en Scandinavie. Le système de santé danois n’utilise qu’un seul et unique système de traitement des données.
En Suisse, la communication et la collaboration s’avèrent très difficiles, une situation d’autant plus regrettable que les soins coordonnés et le suivi à domicile sont à portée de main, grâce à l’existence des services d’aide et de soins à domicile, des services de repas, des aides ménagères et de la prise en charge de proches. Pourtant, il n’existe que peu de projets de soins coordonnés en Suisse.
Prise en charge de 60 patient-e-s à domicile
Au terme d’une vaste étude de faisabilité, la BFH veut lancer un nouveau projet pilote, «patient@home», en collaboration avec le Centre hospitalier Bienne (CHB) et l’entreprise informatique lausannoise Domo Health. Seul son financement n’est pas encore tout à fait garanti. Pendant une année, 60 patient-e-s bénéficieront d’un suivi renforcé à domicile. Du côté du CHB, le projet est mu par la pénurie croissante de personnel qualifié. Dans un premier temps, les données médicales et organisationnelles ne seront échangées qu’entre le CHB et les services d’aide et de soins à domicile. Pour le projet pilote, toutes les données sont stockées dans un système central grâce à une solution logicielle fournie par l’entreprise informatique lausannoise.
La BFH coordonnera le projet, accompagnera son volet scientifique et concevra si nécessaire de nouveaux outils informatiques. À titre d’exemple, ces derniers pourraient inclure des applications utilisateur permettant aux patient-e-s de surveiller eux-mêmes, à domicile, diverses fonctions liées à leur santé. Reste à clarifier certains points: quelles sources de données et quels appareils de mesure sont nécessaires pour la surveillance des différentes pathologies? Quelles sont les actions en matière de communication et de documentation qui s’imposent? Quelles données sont générées, et grâce à quelles mesures thérapeutiques? Quelles informations sont nécessaires?
Des appareils de télédiagnostic permettant d’améliorer la prise en charge des patient-e-s à domicile sont requis. En simplifiant quelque peu, on pourrait représenter une filière de soins à domicile comme suit: un employé des soins à domicile tient un stéthoscope numérique sur la poitrine d’une patiente. Le rythme cardiaque est enregistré sur un fichier audio, lui-même stocké sur la plateforme de données centrale. Un médecin récupère ensuite le fichier, l’analyse et établit au besoin une ordonnance auprès d’une pharmacie en ligne. Le médicament prescrit est alors acheminé chez la patiente par un service de livraison à domicile. D’autres appareils de télédiagnostic sont utilisés, par exemple pour surveiller la saturation en oxygène du sang ou pour mesurer et enregistrer la fonction pulmonaire. De plus, des entretiens avec les médecins se déroulent par écrans interposés. À l’avenir, l’utilisation de robots infirmiers est aussi envisageable.
Convivial et fiable?
Certains de ces appareils doivent être utilisés par les patient-e-s mêmes, ce qui permet une surveillance plus étroite que s’ils n’étaient utilisés qu’une fois par jour par le personnel des soins à domicile. Le projet se penche donc également sur la question de la convivialité des appareils pour les différents groupes d’âge et sur la fiabilité de leur surveillance des fonctions de santé.
Il s’agit en outre de déterminer dans quelle mesure la prise en charge à domicile est bien perçue et acceptée par les patient-e-s et leurs proches. Car l’objectif à moyen terme est clair: le CHB veut intégrer «patient@home» à ses opérations quotidiennes et rattacher les médecins de famille au système. D’une certaine façon, ce projet veut aussi montrer au Canton de Berne et à la Confédération que de telles prestations de coordination doivent se montrer rentables pour les institutions de santé si l’on veut contribuer au recul des couts de la santé. Car à l’heure actuelle, de telles prestations ne peuvent pas être facturées.
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